lundi 13 juin 2011

SIDA, un vaccin semble enfin concluant

Vingt-cinq années de recherche sur le vaccin contre le sida commencent enfin à payer. Près de dix-huit mois après l’espoir soulevé par le candidat-vaccin ‘’thai’’ en 2009 (voir S&V n°1106, pa.98), une nouvelle piste très prometteuse vient de démontrer son intérêt… et cette piste est française. Car là ou l’essai thaïlandais recourait à deux concepts anciens qui, même combinés, ne conféraient qu’une protection de 44% en moyenne, ce nouveau candidat est un vaccin de seconde génération, basé sur une compréhension poussée des mécanismes biologiques de l’infection par le VIH, surtout, les premières données, chez cinq macaques femelles, ne suggèrent rien moins qu’une protection de 100% ! ces 100% de protection, même la conceptrice du vaccin, la chercheuse Morgane Bomsel, de l’institut Cochin à Paris, n’osait en rêver.
Jamais de tels résultats n’avaient été observés, même chez le singe. ‘’les cinq femelles vaccinées ont été protégées, alors que les cinq ayant reçu le placebo, un produit ne contenant aucun principe actif, ont été infectées. ‘’C’est que le protocole consistait à exposer plus de 13 fois les muqueuses vaginales à de fortes dose de SHIV, un virus ‘’chimère’’ qui mélange des gènes e l’enveloppe du VIH à ceux du SIV, le virus de l’immunodéficience simien. Pour la première fois donc, un vaccin est parvenu à induire une protection au niveau des muqueuses, portes d’entrée du virus dans l’organisme, dont la biologiste est une des rares spécialistes mondiales. Autre avancée : dans cette étude, il n’y a pas eu besoin que des anticorps circulent dans le sang, alors que leur production était jusqu’alors l’objectif des vaccins précédents… avec une efficacité bien en deçà des résultats escomptés.
Premier test chez la femme
L’histoire démarre il y a quatre ans. Morgane Bomsel identifie au Cambodge, chez des couples sérodifférents et des prostituées, des femmes qui restent séronégatives bien qu’elles soient fréquemment exposés au VIH. Son équipe repère que ces femmes possèdent des anticorps dirigés contre un fragment bien particulier de la protéine gp41 du virus. Ce qui attire leur attention, c’est que ces anticorps semblent protecteurs, alors que la majorité des anticorps habituellement produits lors d’une exposition au virus ou à des fragments du virus ne le sont pas. Ce sont donc des fragments de gp41, très finement caractérisés, que l’équipe a introduits dans son candidat-vaccin, et qui ‘’semblent être une des clés de son efficacité’’, note la chercheuse. Son mode d’administration ? Deux injections intramusculaires et deux administrations par spray nasal. ‘’ Pour induire une réponse au niveau des muqueuses, le candidat-vaccin doit être administré dans une muqueuse. Car il se trouve que chacune d’entre elles est inductrice de l’immunité des autres muqueuses à laquelle elle est reliée par le système lymphatique : les cellules induites dans le nez circulent jusqu’au vagin, ou elles peuvent produire leurs anticorps. L’intramusculaire, elle, booste le système et est aussi reliée au vagin, par une voie encore inconnue’’.
Particulièrement prometteurs, ces résultats laissent malgré tout planer quelques incertitudes. Les essais ont été menés sur des muqueuses ‘’saines’’ ; le nombre d’animaux testés était faible ; et la réponse immune induite par le vaccin n’a pas été vérifiée au-delà de six mois. Par ailleurs, on se rappellera que  de nombreux candidats-vaccins ont déjà été abandonnés au cours des passages du modèle pour singe à l’être humain…
Il n’empêche, une première étude a été menée chez la femme pour vérifier la façon dont le vaccin est toléré (ce qui ne devrait pas poser de problème, car la partie immunisante du vaccin est portée par un vecteur déjà utilisé chez l’être humain), et surtout pour vérifier si les anticorps espérés ont bien été produits. Les premiers résultats semblent particulièrement encourageants, mais ils ne seront toutefois connus précisément qu’au printemps.
 Réf : magazine science & vie, N° 1123, page 42, avril 2011

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