vendredi 30 septembre 2011

Compléments alimentaires : la grande illusion


Gélules, apports multivitaminés, extraits d'algues ou oligoéléments : les compléments alimentaires séduisent un public de plus en plus large, mais leurs effets semblent parfois aller à l'encontre de l'objectif poursuvi. Les personnes ingérant ces additifs, révèle une étude de l'Université de Taïwan, se sentent protégées contre les maladies et se livrent du même coup à divers comportements dangereux ou malsains, négligeant les règles élémentaires de prudence.
Le psychologue Wen-Bin Chiou a offert à 41 Taïwanais de consommer un mélange diététique présenté comme un concentré multivitaminé, énergisant et revitalisant. Il s'agissait en réalité d'un placebo. Comme groupe témoin, 41 autres participants ont consommé le même placebo, mais présenté pour ce qu'il était : une substance inactive.
Comparés au groupe témoin, les 41sujets persuadés d'avoir absorbé un complément alimentaire ont déclaré, via des questionnaires, être plus attirés par les soirées arrosées, la prise de stupéfiants, le bronzage à haute dose ou les rapports sexuels non protégés. Ils étaient également moins désireux de faire du vélo, de la course à pied, de la natation ou du yoga.
Les psychologues ont alors proposé à leurs sujets un questionnaire dit d'invulnérabilité, composé de questions telles que : « Rien ne peut me faire de mal », « Les maladies sont pour les autres », etc. Non seulement les personnes pensant avoir pris des compléments alimentaires obtenaient des scores supérieurs à ce questionnaire, mais la note obtenue était directement liée à leur attirance pour les activités dangereuses citées.
D'où la conclusion : les « potions magiques » multivitaminées et autres stimulants entraînent un sentiment d'invulnérabilité qui conduit leurs consommateurs à baisser la garde vis-à-vis des comportements à risque. Voilà qui rappelle les régimes minceur : les personnes qui prennent des produits amaigrissants se sentent parfois autorisées à manger sans restriction.

Bisphénol A : les effets à faibles doses officiellement reconnus



Ce n’est pas le premier avis, loin de là, que l’agence sanitaire française rend sur le bisphénol A, l’un des multiples perturbateurs endocriniens présents dans notre environnement. Cependant les deux rapports publiés aujourd’hui, l’un sur les effets sanitaires l’autre sur les usages du BPA, vont plus loin que les précédents. «Ce travail met en évidence des effets sanitaires, avérés chez l’animal et suspectés chez l’homme, même à de faibles niveaux d’exposition », écrit l’Anses dans son communiqué. Elle considère «disposer de suffisamment d’éléments scientifiques pour identifier d’ores et déjà comme prioritaire la prévention des expositions des populations les plus sensibles que sont les nourrissons, les jeunes enfants, ainsi que les femmes enceintes et allaitantes ».
Il y a quelques mois, tout en reconnaissant l’importance des «signaux d’alerte», l’agence de sécurité sanitaire (1) restait plus prudente. En février 2010 l’Afssa estimait, à l’issue d’une expertise, que «la méthodologie de ces études ne [permettait] pas d'interprétation formelle des données qui remettrait en cause les précédentes évaluations du risque sanitaire ». Tout en insistant sur la nécessité de poursuivre le travail d'expertise sur cette substance utilisée pour fabriquer des plastiques (polycarbonate) et des résines époxydes.
Exposition à petites doses
Elément important, l’Anses reconnait que les effets du bisphénol A mis en évidence par les études se produisent à « des doses notablement inférieures aux doses de référence utilisées à des fins règlementaires ». En clair, il ne suffit plus de se référer aux doses journalières tolérables (DJT) définies par l’agence sanitaire européenne et contre laquelle se battent nombre de toxicologues (lire l'interview d'André Cicolella sur le Nouvelobs.com)
L’EFSA s’accroche à ces limites règlementaires, définies en 2006 pour le BPA. En septembre 2010 elle concluait une fois de plus que ses experts «n’avaient pu identifier aucune nouvelle preuve qui les amènerait à reconsidérer la dose journalière tolérable (DJT) existante pour le BPA». Tout en reconnaissant que des études font état de modifications au stade embryonnaire à cause de l’exposition au BPA, l’agence estimait qu’il y a avait encore trop de lacunes dans les connaissances.
Réduire l’exposition
L’agence sanitaire française va donc plus loin en recommandant de réduire l’exposition aux BPA, en particulier pendant des périodes sensibles comme la grossesse  Plusieurs études suggèrent en effet que l’exposition in utero aux perturbateurs endocriniens aurait des répercussions à long terme sur l’individu (lire Le BPA, un perturbateur de l'équilibre?). Le Canada a interdit le bisphénol A en octobre 2008. Pour l’instant, en France, il n’est interdit que dans les biberons.
L’agence souligne que les denrées alimentaires constituent la source principale d’exposition au BPA, à cause des emballages alimentaires, des revêtements des canettes et des boîtes de conserve, qui contiennent du bisphénol A. L’Anses lance un appel à contribution pour recueillir le plus d’informations possibles sur les produits de substitution au BPA –notamment sur leur innocuité.
La réglementation sur le bisphénol A pourrait donc rapidement évoluer en France. Dès demain, à l'Assemblée nationale, sera présentée en commission des affaires sociales une proposition de loi rédigée par des députés socialistes, menés par Gérad Bapt, "visant à la suspension de la fabrication, de l'importation, de l'exportation et de la mise sur le marché de tout conditionnement à vocation alimentaire contenant du bisphénol A". Cette proposition sera discutée dans l'hémicycle le 6 octobre prochain.