jeudi 11 août 2011

Le problème de la cuisson


1. Buts et méthodes de la cuisson
La cuisson est le traitement des aliments par la chaleur.
Le chauffage des aliments est mis en oeuvre pour plusieurs buts dont les principaux sont :
* donner une texture, un goût, un arôme appréciés des consommateurs.
* assurer la conservation.
* favoriser la digestibilité.
* détruire les micro-organismes.
Diverses méthodes de cuisson sont possibles (joyeux 1994) :
* blanchiment.
* pasteurisation.
* stérilisation.
* dans l'eau avec une casserole (bouillie), ce qui correspond à 100 °c.
* dans l'huile avec une poêle (friture), se situant entre 150 et 190 °c.
* sur un feu de bois ou de charbon avec une broche ou un gril (grillade), atteignant entre 300 et 500 °c.
* dans un four classique, entre 100 et 275 °c.
* dans un four à micro-ondes.
* au contact d'une surface chaude.
* à la vapeur dans une cocotte minute.
* à la vapeur douce dans un autocuiseur ne dépassant pas 100 °c.
* à l'étouffée, sans liquide, au-dessous de 100 °c, dans un récipient fermé par un couvercle.
Dans tous les cas, l'élévation thermique est obtenue par agitation des molécules de l'aliment, du milieu qui l'entoure et de l'ustensile qui le contient.
2. Conséquences visibles de la cuisson
La cuisson transforme de façon évidente l'aspect des aliments et les changements sont d'autant plus nets que la hausse de température est élevée et prolongée. Ainsi :
* les légumes et les fruits sont considérablement ramollis.
* l'oeuf qui était liquide devient solide.
* le maigre du bifteck initialement rouge tend à noircir et le gras initialement blanc tend à jaunir.
* une dessiccation progressive se produit.
Le goût de l'aliment est plus ou moins modifié, ainsi que son odeur, avec parfois l'arôme caractéristique du grillé. Le simple témoignage de nos sens montre bien que le produit cuit diffère beaucoup du produit cru. Cette impression est largement confirmée par les analyses chimiques.
3. Conséquences chimiques de la cuisson
Lors de la cuisson, sous l'effet de l'agitation thermique, les molécules se choquent, se cassent et s'accrochent au hasard à d'autres structures pour former de nouvelles combinaisons très complexes dont certaines n'existent pas dans la nature. Ce point essentiel a été souligné à juste titre
Les sucres se polymérisent, les huiles s'oxydent, se polymérisent, se cyclisent d'autant plus aisément qu'elles sont insaturées. C'est pourquoi il vaut mieux éviter de chauffer les huiles de tournesol, de maïs, de colza riches en acides gras insaturés. Les dégâts sont moins graves avec l'huile d'arachide, qui ne contient que 30 % d'acides gras insaturés (mendy 1986).
Des isomères peuvent se former :
* oses de type l à partir des oses de type d.
* acides aminés de type d à partir des acides aminés de type l.
* acides gras trans à partir des acides gras cis.
Or comme nous l'expliquerons au chapitre 15, nos enzymes n'agissent que sur la substance originelle, naturelle, et non sur l'isomère. On peut comparer l'enzyme à une main droite qui entre très bien dans un gant droit (substance naturelle), mais non dans un gant gauche (isomère image en miroir de la substance naturelle). Le devenir des isomères, lorsqu'ils ont franchi la barrière intestinale, reste inconnu. Au mieux, ils sont inutilisables.
Au pis, ils sont dangereux et c'est probablement parfois le cas. Au chapitre sur le problème des huiles, nous reviendrons sur la nocivité des acides gras trans.
Comme l'observe burger (1988), il suffit souvent d'une petite différence par rapport à la molécule normale pour obtenir une molécule que l'organisme est incapable de traiter. Ainsi, le 2-désoxyglucose est très proche du glucose, mais il lui manque un atome d'hydrogène lié au deuxième carbone. Le 2-désoxyglucose est transporté et absorbé par les mêmes systèmes que le glucose, mais arrivé dans les cellules il ne peut être transformé et va s'accumuler.
La chaleur a un impact particulièrement net sur les protéines, dont les conséquences ont été fort bien analysées.
1) modification de la structure spatiale
Aucune liaison covalente n'est rompue et la structure primaire n'est pas affectée. Mais des liaisons hydrogènes sont rompues et des liaisons hydrophobes intramoléculaires sont renforcées, ce qui entraîne un changement de la structure spatiale.
2) modification des chaînes latérales des résidus d'acides aminés
* le tryptophane engendre des dérivés carboliniques, les carbolines a, b et y. Or la y carboline, potentialisée par la b carboline est un puissant agent cancérigène potentiel. Le pouvoir mutagène de trp-pl et trp-p2, contenus dans la y carboline, mesuré par le test ames-salmonella est très élevé : 104 000 et 39 000 révertants par microgramme. Ce sont des chiffres record, bien supérieurs à ceux enregistrés avec les autres substances cancérigènes connues.
* l'acide glutamique donne lui aussi naissance à des dérivés cancérigènes potentiels. Les carbolines glu-pl et glu-p2 ont un pouvoir mutagène de 49 000 et 1 900 révertants par microgramme.
* la lysine, l'ornithine, la phénylalanine génèrent aussi des carbolines, respectivement lys-p1, orn-p1 et phe-p1.
3) interactions entre protéines et glucides réducteurs
Ce sont les fameuses réactions de maillard, mises en évidence par ce chimiste dès 1916 et qui ont donné lieu à de nombreux travaux. Elles se produisent entre le groupement amine des protéines et le groupement carbonyle des sucres. Elles se déroulent en trois étapes, aboutissant à la formation de substances de plus en plus complexes :
* lors de la première étape se forment des aldosamines (réarrangement de heyns) et des cétosamines (réarrangement d'amadori) substances peu ou pas colorés.
* lors de la seconde étape, les composés de heyns et d'amadori se transforment en prémélanoïdines colorées, à l'origine de l'odeur de « grillé ».
* lors de la troisième étape se constituent des polymères bruns qui sont les mélanoïdines.
Les molécules de maillard sont volumineuses et de plus en plus difficiles à métaboliser, à mesure qu'elles se complexifient. Les plus coriaces sont pratiquement incassables. Elles sont insolubles dans l'eau et résistantes aux enzymes protéolytiques. Même l'eau de javel et les détergents ne peuvent les briser. On peut se poser la question inquiétante du devenir de ces grosses molécules, lorsqu'elles ont traversé la barrière intestinale. Deux destins sont à mon avis possibles :
* ou bien elles s'accumulent, sinon dans les cellules, du moins dans le milieu extra-cellulaire, ce qui peut déboucher sur une pathologie d'encrassage
* ou bien elles sont captées par les macrophages, qui vont selon moi les transporter entière jusqu'à un émonctoire pour s'en débarrasser, ce qui peut aboutir à une pathologie d'élimination.
4. Les effets nocifs de la cuisson
Il faut retenir essentiellement que la cuisson engendre un grand nombre de molécules complexes, n'existant pas à l'état naturel, dont les propriétés et le destin sont inconnus. Burger (1988) a raison d'insister sur cette notion capitale.
Il a été démontré que certaines substances issues de la cuisson sont toxiques ou cancérigènes. Alors que les pesticides et les colorants préoccupent beaucoup les consommateurs, dang (1990) estime à juste titre qu'ils contiennent beaucoup moins de composés mutagènes que les aliments cuits.
Les transformations de deux acides aminés essentiels, comme le tryptophane et l'acide glutamique, en sont des exemples édifiants.
Les effets dangereux de la cuisson peuvent être mis en évidence, soit directement, soit indirectement en constatant les actions bénéfiques de certains aliments crus.
A) arguments directs
J'en citerai quatre :
1) au cours de la phase de digestion d'un repas contenant des produits cuits, on observe une leucocytose, qui n'apparaît pas après la prise de produits crus. Ceci suggère que des macromolécules ont traversé la paroi intestinale et ont suscité une réponse immunitaire.
2) les graisses animales cuites, essentiellement viandes et produits laitiers, favorisent la survenue du cancer du sein et du cancer du colon. Je reviendrai sur ce point au chapitre des maladies malignes.
3) certaines populations anglo-saxonnes et scandinaves, grandes consommatrices de certains aliments cuits : blé, maïs, lait et graisses animales paient aussi un lourd tribut à l'obésité, au diabète de la maturité et aux maladies cardio-vasculaires.
4) certaines molécules de maillard, incassables par nos enzymes, sont absentes chez le nourrisson et présentes en quantité relativement abondantes chez le vieillard. Elles pourraient participer au vieillissement vasculaire et cérébral prématuré, aux démences séniles, souvent observées à notre époque.
B) arguments indirects
Je les puiserai chez les mammifères et chez les hommes.
1) les expériences réalisées par pottenger sur 900 chats étudiés pendant 10 ans sont très instructives.
Ce médecin pratiquait des surrénalectomies, suivies d'administration d'hormones surrénaliennes. Ayant été amené accidentellement à nourrir certains animaux de viande crue, alors que les autres chats étaient nourris de viande cuite, il a fait plusieurs constatations, vérifiées ensuite à plusieurs reprises.
Les chats qui mangent la viande crue :
* résistent mieux à l'intervention chirurgicale.
* ont beaucoup moins de maladies infectieuses, inflammatoires et allergiques.
* sont beaucoup moins irritables.
* engendrent des chatons plus vigoureux que leurs mères allaitent sans difficulté.
De plus, la dégénérescence des chats qui mangent la viande cuite s'aggrave au fil des générations.
2) le chimpanzé est très proche de l'homme sur le plan de l'évolution phylogénique et possède 99,3 % de gènes analogues aux nôtres. Pourtant ce primate ne mange à l'état sauvage que des aliments crus. Lorsqu'il est captif dans un laboratoire ou dans un zoo, il tolère fort mal des produits cuits et reçoit de façon exclusive ou quasi exclusive des produits crus.
3) bien que nous soyons au xxe siècle, certaines populations vivent encore ou vivaient tout récemment comme à l'âge de pierre. Elles constituent donc des modèles intéressants :
* les esquimaux, ne disposant pas de bois pour faire du feu, ont longtemps tiré leurs principales ressources du poisson et du renne sous forme crue. Malgré les fortes doses de graisses animales amenées par ce régime, ils sont dix fois moins souvent que les européens et les américains atteints de maladies cardio-vasculaires.
* les pygmées ingurgitent quotidiennement, sans inconvénients pour leur santé, des quantités de viande effarantes aux yeux des occidentaux.
Toutefois cette viande est quasiment crue.
5. Conséquences pratiques
Il est toujours préférable de manger des aliments crus plutôt que cuits.
Si cependant, on souhaite utiliser la cuisson, il faut tenir compte d'un fait essentiel. Les modifications induites par la chaleur sont d'autant plus importantes que la température est haute et que le temps d'exposition est long. La frontière au-dessus de laquelle les aliments subissent des transformations importantes se situe autour de 110 °c.
Les céréales et les viandes sont cuites à température élevée. Les légumes verts et les légumes secs sont souvent cuits à température modérée. C'est une des raisons principales pour lesquelles les premières sont plus néfastes que les secondes.
Pour choisir une méthode de cuisson, mon avis rejoint ceux de l'école de et de :
* il faut éviter les grillades et les fritures qui se situent entre 300 et 700 °c.
* il faut éviter le four classique qui atteint 300 °c.
* il faut éviter la cocotte minute qui parvient jusqu'à 140 °c.
* il convient d'opter pour la cuisson à l'étouffée ou la cuisson à la vapeur douce.
Le four à micro-ondes élève la température pendant un temps très court autour de 75 °c, bien au-dessous de la frontière des 110 °c. À priori, il semble donc inoffensif. Cependant cet appareil possède plusieurs propriétés inquiétantes (debry 1992) :
* il provoque un changement d'orientation des molécules d'eau,
2,45 milliards de fois par seconde. Nul ne connaît les conséquences de ce phénomène.
* en cas de fuite, il émet des radiations non ionisantes aux effets délétères pour l'organisme humain.
* il transforme certains acides aminés l en acides aminés d. C'est le cas de la proline et de l'hydroxyproline qui échappent alors à l'action de nos enzymes.
* il induit dans plus de 90 % des aliments de fortes perturbations détectées par la méthode des cristallisations sensibles.
Les produits chauffés au four à micro-ondes subissent donc des modifications de structure subtiles, mais probablement redoutables.
Une expérience menée par henri joyeux est en faveur de cette hypothèse.
Trois lots de souris sont nourris avec les mêmes aliments préparés de façon différente :
* pour le premier lot, chauffage au four à micro-ondes,
* pour le second lot, cuisson à la cocotte minute.
* pour le troisième lot, état cru ou cuisson à la vapeur douce.
Les souris du premier lot ont refusé la nourriture pendant plusieurs jours puis, poussées par la faim, ont fini par manger. Des cellules cancéreuses ont alors été inoculées à tous les rongeurs. Le pourcentage d'animaux développant le cancer a été de 100 % pour le premier lot, 50 % pour le second lot et 0 % pour le troisième lot. Mieux vaut donc ne pas se servir du four à micro-ondes.