jeudi 1 septembre 2011

Cancer du col utérin : un dépistage à réformer



Les classiques frottis pourraient à terme être supplantés par la recherche de papillomavirus.
Faut-il changer les modalités de dépistage du cancer du col de l'utérus ? Remplacer le traditionnel frottis par un test de biologie moléculaire recherchant les papillomavirus (HPV) à haut risque, ces virus qui font le lit des tumeurs du col utérin ? Alors que la question taraude de plus en plus les spécialistes, une étude amène un nouvel argument aux partisans de la stratégie virologique. Chez 40 000 Américaines âgées de plus de 25 ans, Philip Castle (Washington) et ses collègues ont comparé les performances du frottis - qui consiste à analyser les cellules du col utérin - à celles de tests HPV, également pratiqués sur un prélèvement local. Et ils concluent, dans la dernière livraison de la revue Lancet Oncology , que la balance penche en faveur de ces derniers. Il n'est en tout cas plus pertinent, comme cela se pratique outre-Atlantique, d'effectuer systématiquement les deux tests.
Les cancers du col utérin (dont 3 000 nouveaux cas sont recensés chaque année en France) sont intimement liés à des papillomavirus, transmis lors de contacts sexuels. Une quinzaine de génotypes de HPV favorisent le développement de ces tumeurs, les deux plus «méchants» étant les HPV 16 et 18. C'est d'ailleurs ce qui a conduit à mettre au point des vaccins anti-HPV dans le but de prévenir ces cancers. En moyenne, il s'écoule vingt-cinq à trente ans entre l'infection virale et la survenue du cancer, période pendant laquelle un dépistage régulier peut repérer des lésions précancéreuses ou des tumeurs très localisées.
L'étude publiée dans The Lancet Oncology confirme que les tests HPV (repérant en particulier les HPV 16 et 18) sont une technique plus sensible que les frottis, ce qui signifie qu'ils détectent davantage les lésions suspectes que l'examen cytologique. Pour ses auteurs, les tests virologiques ont tous les atouts pour être proposés d'emblée en dépistage, et sans associer de frottis. Les spécialistes français restent cependant divisés.
Tumeurs évitables 
Du côté des partisans de la virologie, le Pr Didier Riethmuller (gynéco-obstétricien, CHU de Besançon) utilise des tests viraux depuis 1996 dans le cadre de programmes de recherche. «Les frottis présentent l'inconvénient d'être faussement négatifs dans 5 % à 15 % des cas (ils passent à côté de 5 % à 15 % des lésions, NDLR) , relève-t-il. Inversement, quand les tests viraux sont négatifs, on peut totalement rassurer la femme sur l'absence de cancer, et il n'y a pas besoin de refaire l'examen avant cinq ans.»
Le Pr Jean Levêque, gynéco-obstétricien au CHU de Rennes, est plus dubitatif sur l'intérêt de cette stratégie en France dans le contexte actuel. «Il est intéressant de disposer d'un test plus sensible, mais cela va conduire à affoler à tort certaines femmes, puisque dans certains cas les examens de contrôle montreront qu'elles n'ont pas de cancer, commente-t-il. Aujourd'hui, les tests viraux posent plus de questions médicales et économiques qu'ils n'apportent de solutions.»
Ces praticiens se rejoignent cependant sur un point : l'urgence à mettre en place un dépistage organisé du cancer du col de l'utérus dans notre pays, comme l'a récemment préconisé la Haute Autorité de santé. Le dépistage individuel, recommandé tous les trois ans, a montré ses limites : la moitié des femmes ne se font pas dépister, et 40 % le font trop souvent.
Résultat, la mortalité due au cancer du col de l'utérus a régressé, mais il tue encore 1 000 femmes par an, et à peu près autant gardent de sérieuses séquelles des traitements. Un bilan d'autant plus inacceptable que ces tumeurs sont totalement évitables, selon le Pr Riethmuller.
Par : Sandrine Cabut, le figaro

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