Face au scepticisme, voire à l'hostilité de
l'entourage, leurs parents peinent à les protéger, selon une enquête
britannique.
«J'ai des
cacahuètes et je vais venir te toucher», s'est vu menacer un enfant par un de
ses camarades de classe. «J'ai peur, je suis pétrifiée à l'idée qu'il aille à
l'école», raconte la mère d'un autre bambin allergique aux arachides. Une femme
soupçonne même son beau-père d'avoir intentionnellement donné un bonbon aux
cacahuètes à son petit-fils, dont l'allergie à cet aliment était parfaitement
connue.
Ces
témoignages édifiants sont issus d'une enquête britannique tout juste publiée
dans la revue spécialisée Chronic Illness. Déjà confrontés à de lourdes
contraintes pour la gestion du quotidien, les parents d'un enfant souffrant
d'allergie à l'arachide doivent affronter le «scepticisme» voire «l'hostilité»
de l'entourage, soulignent les chercheurs. Leur constat est d'autant plus
inquiétant que, chez ces petits patients, le moindre contact avec de l'arachide
peut induire une réaction violente, potentiellement grave.
Découverte précocement
De plus en plus fréquente ces dernières décennies,
comme les autres allergies alimentaires, l'allergie à l'arachide atteint environ 1% des
enfants. Elle est souvent découverte précocement, à l'âge des premiers gâteaux
apéritifs et autres cacahuètes. Les symptômes, quasi immédiats après
l'ingestion, peuvent être variables: urticaire, asthme, troubles digestifs…
Dans les cas les plus sévères, heureusement minoritaires, peut survenir un choc
anaphylactique, avec risque vital. L'arachide étant omniprésente dans
l'alimentation (parfois à l'état de traces dans certains produits industriels),
les parents concernés doivent apprendre à contrôler en permanence
l'environnement, et à pouvoir faire face en urgence à une exposition
accidentelle.
Pour en savoir plus sur l'expérience de ces familles,
Mary-Dixon-Woods (université de Leicester) et son équipe en ont interrogé 26.
Leur étude confirme que les parents prennent rapidement conscience de la
gravité potentielle de cette allergie, et qu'ils se mobilisent pour sécuriser
l'environnement de l'enfant, en premier lieu à la maison. En général, tout
produit contenant de l'arachide est ainsi banni du domicile.
Pas toujours pris au sérieux
Le milieu extérieur est en revanche complexe à
contrôler, constatent les chercheurs. De nombreux témoignages mettent l'accent
sur les obstacles tant en milieu familial que scolaire, dans les restaurants,
lors de vacances… Par précaution, des familles en viennent à renoncer aux
invitations. «Je dis qu'on ne peut pas venir. Nous ne pouvons pas prendre le
risque… Vous ne pouvez pas aller quelque part sachant que les gens ne se lavent
pas les mains après mangé des cacahuètes », se justifie une mère. D'autres
parents racontent le «cauchemar» des fêtes d'anniversaire. Quand ils déposent
leur enfant et avertissent les adultes présents des précautions à prendre,
ceux-ci ne les prennent pas au sérieux. Le petit allergique se retrouve accusé
d'exagérer le danger, ses parents de le surprotéger. Pour tenter de se faire
entendre, certaines mères équipent leur rejeton d'un tee-shirt mentionnant son
allergie, et intimant de «ne pas le nourrir».
En France,
certaines familles font aussi état de leur calvaire sur des forums. «La vie
d'un enfant allergique n'est pas toujours drôle à cause des nombreuses
privations, mais le plus dur à vivre c'est la méchanceté et la bêtise de
certains adultes », écrit ainsi une femme sur la page Facebook de l'Association française
pour la prévention des allergies (Afpral). «Dans mon expérience, je n'ai jamais
rencontré de réactions aussi hostiles. En général, l'entourage familial et
scolaire est plutôt bien sensibilisé», rassure l'allergologue Pierrick Hordé.
Même si les allergies à l'arachide sont souvent définitives, ce spécialiste
recommande toutefois, comme pour toute allergie alimentaire, de réévaluer
régulièrement la situation.