C'est un sujet peu évoqué mais objet de préoccupations qu'a décidé
d'aborder aujourd'hui notre chroniqueuse nutritionniste Isabelle Mallet : la
présence dans nos assiettes d'acrylamide. Une molécule qui se forme en fin de
cuisson et qui pourrait comporter des risques pour notre santé.
"La Food Standards Agency vient de publier son rapport sur l’étude de
l’évolution des taux d’acrylamide dans nos assiettes, entre 2007 et 2011. Ce composé, reconnu par
l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme présentant un risque pour la
santé humaine, fait en effet l’objet d’une surveillance étroite depuis quelques
années.
Les mesures prises par les industries agroalimentaires pour réduire les
niveaux d’acrylamide dans leurs produits ont-elles été efficaces ? Et bien ce
n’est pas encore aujourd’hui que l’on connaîtra la réponse ! Si l’étude montre
quelques tendances, elle ne les met pas clairement en évidence, la faute à des
échantillons réduits et à un temps d’étude trop court. Utilisé dans l’industrie
des plastiques et identifié comme l’un des composants de la fumée de cigarette,
l’acrylamide n'a été identifié en proportion élevée dans certains de nos
aliments qu'en 2002.
Autant dire qu’au vu de ses utilisations connues, cette découverte a fait
du bruit et a mis en alerte les autorités sanitaires nationales et
internationales ! Ces dernières ont ainsi mis en place des études de
surveillance et de suivi tandis que les chercheurs se sont penchés sur les
mécanismes de formation de l’acrylamide dans les aliments ainsi que sur ses
effets sur la santé humaine.
L’acrylamide, des effets néfastes prouvés sur les animaux
Ce composé se forme naturellement dans certains aliments lors d’une
préparation à plus de 120°C, suite à la réaction entre un acide aminé
(l’asparagine) et des sucres simples. Les frites et les chips de pomme de
terre, le pain de mie, les biscottes, les biscuits et le café torréfié, qu’ils
soient fabriqués en industrie ou à la maison, sont les principaux vecteurs
d’acrylamide dans notre alimentation, c’est le cas aussi des barbecues… avec la
saison qui va finir par montrer le bout de son nez. La question qui suit est
donc : l’acrylamide est-il dangereux pour la santé ?
Des études sur les animaux montrent que l’absorption d’acrylamide en
quantité conséquente et sur une période prolongée conduit à une augmentation du
risque de cancer, à des lésions du matériel génétique ainsi que du système
nerveux. Reste donc à savoir si ces effets se retrouvent chez l’homme et si
oui, pour quelles doses absorbées. Les études en cours devraient nous permettre
d’en savoir plus mais il faudra encore un peu de patience…
Pour l’OMS en tous cas, l’acrylamide représente bien un risque pour la
santé humaine et les industries agroalimentaires sont donc vivement incitées à
prendre des mesures pour en réduire les teneurs. Mais il n’existe pas (encore)
de teneur maximum légale, seulement des "valeurs indicatives" fixées
par l’European Commission Recommendation. L’étude réalisée en 2011 par la Food
Standards Agency avait ainsi pour objectif de vérifier l’efficacité des mesures
mises en œuvre par les industriels en comparant les résultats à ceux de
2007.
Une étude
"à suivre…"
Selon les données dévoilées, l'étude montre une tendance à des teneurs en
acrylamide à la hausse dans les produits pour bébés à base de céréales (excepté
les biscuits) et à la baisse pour les frites précuites, les produits à base de
pomme de terre et le pain. Cependant, il s’agit bien de tendances et la
conclusion de l’étude est : pas de conclusion, l’étude doit être poursuivie...
Les résultats s’appuient sur un échantillon de 248 produits vendus aux
Etats-Unis, ce qui est assez peu représentatif au vu de l’offre alimentaire
existante.
Pour certains types de produits, seules une ou deux références ont été
étudiées. Sans compter qu’au sein d’un même groupe de produits, la variabilité
s’avère parfois trop importante pour que la "moyenne" ait une
quelconque signification. Pour finir, la Food Standards Agency considère que le
laps de temps 2007-2011 est trop court pour discerner de vraies
évolutions. Elle préconise donc la poursuite de l’étude (prochains
résultats attendus en 2013).
En attendant, voici quelques conseils de bons sens et de prudence : cuire
les frites et autres pommes-noisettes pour qu’elles ne soient que juste dorées
et claires, évitez de trop griller votre pain, bien nettoyer les grilles de
cuisson après chaque barbecue pour enlever tous les restes brulés et éviter les
grillades trop cuites, au restaurant, à la maison et au barbecue !"