C’est la plus importante étude jamais menée en la matière. Pendant quatre ans, l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) a testé l’exposition des aliments à 445 substances chimiques. Un travail de longue haleine qui a permis d’évaluer le risque encouru par les consommateurs de produits aussi divers que le pain, le lait pour nourrisson ou encore les frites. En tout 20 000 produits ont été passés au crible des scientifiques de l’ANSES.
Les conclusions, rendues publiques jeudi, démontrent, selon l’agence, que pour 85 % des substances analysées, le risque alimentaire pour la population peut être écarté car l’exposition se situe en deçà des valeurs toxicologiques de référence établies par l’Union européenne. Véronique Sirot, coordinatrice scientifique de cette étude, en explique les enjeux et les conclusions à FRANCE 24.
France24.com : Quel est le principal risque alimentaire encouru par les consommateurs aujourd’hui ?
Véronique Sirot : L’étude démontre que l’exposition des aliments à des substances chimiques ne peut présenter de risque pour les consommateurs que si le régime alimentaire est trop monotone.
Il y a en fait un mécanisme de vase communicant, certains produits pouvant neutraliser les risques liés à l’exposition à des substances chimiques provenant d’autres aliments. C’est pourquoi la principale recommandation que nous faisons est, surtout, de manger d’un peu de tout.
F24 : Le rapport montre l’exposition à des substances chimiques d’aliments de consommation quotidienne comme le pain, le café ou les pâtes… faut-il éviter d’en consommer ?
V.S. : Certains aliments, comme ceux que vous citez, sont susceptibles d’exposer les consommateurs à une contamination. Mais ce n’est pas tant parce que le pain ou les pâtes seraient très exposés, mais plutôt parce qu’ils sont très consommés.
Le risque vient donc de la surconsommation. Ainsi, par exemple, les grands buveurs de vins sont susceptibles d’être exposés à du sulfite [une substance qui peut provoquer des réactions inflammatoires, NDLR] au dessus des valeurs toxicologiques de références. C’est le cas également pour des personnes qui ont des consommations importantes de thon, de coquillages par exemple qui peuvent contenir des métaux lourds. C’est le cas aussi de certains enfants ou adolescents quand ils se nourrissent de façon excessive de céréales, de frites, de chips… En tout, pour onze substances ou familles de substances, un risque de dépassement des valeurs toxicologiques de référence existe pour certains groupes de consommateurs.
F24 : Certaines maladies peuvent-elles être déclenchées par une exposition à ces substances chimiques ?
V.S. : Notre étude EAT n’avait pas pour but d’étudier les liens entre l’alimentation et le développement de pathologies. A ce sujet, l’Agence a publié récemment un rapport sur le lien entre la nutrition et le cancer, par exemple.
F24 : Est-ce que votre rapport permet de remettre en cause la préparation industrielle de certains aliments ?
V.S. : Les aliments peuvent contenir certaines substances, comme par exemple des métaux qui sont présent naturellement dans les sols, mais ils peuvent également être contaminés par des activités humaines.
De ce côté-là , il y a de bonnes nouvelles, comme pour les dioxines et les PCB. On note une diminution de l’exposition aux dioxines et PCB par rapport au début des années 2000. Elle a été divisée par 4, montrant l’efficacité de la réglementation mise en place pour ces substances.
Mais, il existe aussi des points de vigilance révélés par l’enquête. En ce sens, l’Anses a fait des recommandations aux pouvoirs publics afin de poursuivre les efforts en matière de réglementation pour certaines substances.
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